Noël fête laïque ou fête religieuse ?
Dès que l'homme a commencé à cultiver la terre, il suivit
attentivement la trajectoire du soleil tout au long de l'année, car c'était de
lui que dépendait la nourriture, la chaleur et le bien-être.
Le cours des
saisons déterminait aussi le moment des fêtes. Depuis la nuit des temps, les
rites de remerciements et de sacrifices étaient célébrés dès que le soleil
atteignait les points significatifs de son orbite, c'est à dire aux solstices
d'été et d'hiver.
Le solstice d'hiver est la période de l'année où les journées recommencent enfin à être plus longues. Les historiens s'accordent à reconnaître
que, bien avant l'époque romaine, on fêtait en Europe la renaissance tant
attendue de la nature et l'espérance de vie nouvelle. Mais en revanche on ne
sait rien de précis sur les cérémonies qui se déroulaient à cette époque. Il est
probable que le feu et la lumière, en tant que symboles, jouaient un rôle
important.
La fête
païenne du solstice d’hiver était appelée « Naissance du soleil » (en latin, Natale) car celui-ci semble reprendre vie lorsque les jours s’allongent… ». (« Natale » étant la racine du mot Noël).
Les saturnales
Les romains invoquaient Saturne, dieu des semailles et de
l'agriculture, dont le nom vient du verbe latin Severe (semer). Sa fête, les Saturnales,
donnait lieu à des réjouissances du 17 au 24 décembre.
L'hiver les journées sont courtes et sombres. On disait
qu'elles s'étendaient jusqu'aux calendes de janvier, le jour de l'An romain.
Les calendes désignaient, chez les Romains, le premier de chaque mois.
De leur côté, les peuples nordiques célébraient "Njord",
dieu de la fécondité et "Idun", gardienne "des pommes de
providence", nourriture des dieux.
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"Idun", gardienne "des pommes de providence" |
Toutes ces croyances antérieures au Christianisme
donnaient l'occasion de fêter le Solstice d'hiver avec pour but de redonner courage
et espoir au peuple bloqué pendant des mois par les sols gelés, l'absence de
vie de la nature et l'obscurité.
A l'origine, les Saturnales avaient lieu à l'occasion des
semailles, mais cette tradition se perdit avec le temps. Cette célébration
servit peu à peu à justifier toutes sortes de réjouissances effrénées, de fêtes, de banquets masqués, d'orgies. On assistait aussi temporairement à une
curieuse remise en question des classes sociales, autorisant les esclaves à ne
pas travailler et à s’habiller comme leurs maitres
Le poète gréco-romain Lucien, qui vécut au IIe siècle après
J.C., décrivit les Saturnales comme une occasion pour boire plus que
d'ordinaire, faire du vacarme, jouer et danser. Lors de ces fêtes on nommait
des rois et on donnait des repas aux esclaves. Il régnait une gentillesse à
l'égard de tous.
Comme pendant nos fêtes de Noël actuelles, on offrait des
cadeaux : des porte-bonheur. Le miel, des gâteaux, de l'or étaient des cadeaux
courants. On décoraient les maisons avec du lierre, des branches de houx et de
gui et tout travail, à part celui de la cuisinière et du banquier, était
interdit.
Malgré l'influence croissante de l'église et de ses
disciples, les rites liturgiques chrétiens ne parvenaient pas à s'imposer face
aux festivités païennes des Saturnales. Cette fête pleine d'entrain entrava
longtemps la propagation du christianisme. Mais la chrétienté fut également
menacée par un autre culte fortement implanté dans l'Empire romain : le culte
de Mithra.
Dans l'ancienne religion iranienne, Mithra était le dieu
de la lumière, le symbole de la chasteté et de la pureté et il combattait les
forces maléfiques. Au IIe et IIIe siècles av. J. C., son culte fut répandu dans
tout l'Empire romain et l'empereur Aurélien en fit même la religion d'Etat. Les
soldats romains, dont bon nombre vénéraient Mithra, furent les ambassadeurs de
cette religion qu'ils répandirent jusque dans les provinces les plus éloignées
de l'Empire.
Au 4e siècle, pour enrayer ce culte païen, l'Eglise
chrétienne prit une mesure très astucieuse. La fête de la naissance du Christ
fut avancée du 6 janvier au 25 décembre. En effet le solstice d'hiver du 25
décembre était la fête la plus importante de l'an mithraïen : on fêtait la
renaissance du "sol invinctus" (dieu invaincu).
Les chrétiens procédèrent de la même manière au cours de
l'évangélisation d'autres peuples : la fête de Noël fut transférée aux jours de
fêtes païens importants, tels que la fête de Jul chez les germains. L'objectif
restait le même : faciliter le passage de la coutume païenne vers la foi
chrétienne.
Un élément facilita cette démarche : il s'avérait
impossible de fixer une date précise pour la naissance du Christ, car à
l'époque il n'existait pas de calendrier universellement valable. La plupart
des chrétiens furent facilement persuadés que la date de la naissance du Christ
était le 25 décembre.
On s'interrogea sur la manière dont on allait célébrer
l'événement. Les autorités ecclésiastiques s'accommodèrent globalement de
l'esprit des saturnales. Même si ces fêtes exubérantes choquaient un peu les
moeurs chrétiennes, il ne fut pourtant pas impossible de concilier les deux
rites. En effet beaucoup d'éléments de la fête païenne s'adaptaient aisément au
nouveau cadre chrétien. Il ne fut pas difficile, par exemple, de créer un lien
entre le houx aux feuilles piquantes et la couronne d'épines du Christ.
Les fêtes de novembre donnent le signal de l'entrée de l'hiver. Fin novembre, il fait froid, la grisaille s'installe, le soleil se cache, les jours deviennent de plus en plus courts, à priori ce ne sont pas des conditions qui donnent envie de faire la fête.... et pourtant ...
A toutes les époques les hommes ont organisé des fêtes
à cette période de l'année afin de conjurer les mauvais sorts, conjurer la peur
de rentrer dans une maison froide plongée dans la nuit et l'arrivée effrayante
des longues nuits.
Au gré des fêtes, on célèbre la lumière et la fécondité.
Avec la lueur des bougies, les maisons sombres se remplissent de lumière. Ces
différentes coutumes apportaient un souffle de chaleur et de convivialité.
Tout commence par la Saint Martin le 11 novembre, très
fêtée en Allemagne,
Sainte Catherine le 25 novembre,
Sainte Barbe le 4 décembre
et la plus importante pour les habitants du nord et de l'est de l'Europe, la
Saint Nicolas le 6 décembre.
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Coiffes de la Saint Catherine |
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Fête de la Saint Lucie en Suède |
Ce soir-là à Lyon des bougies sont allumées et placées dans les verres déposés
sur le bord des fenêtres. La tradition veut que chaque famille lyonnaise
conserve ses décorations de Noël, son assortiment de verres du 8 décembre,
épais et parfois colorés. On appelle ces verres garnis d'une bougie, des «
lumignons ».
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Fête des lumières : les lumignons |